écrire-lire

Y a-t-il encore quelque chose à dire, un questionnement possible sur l'écrire-lire ? probablement si l'on s'attache plus à la construction du langage qu'à l'apprentissage du code.

Pascale B : Protéger les albums de la bibliothèque du travail scolaire !

Juliette : Ils m'ont redemandé des fiches !

Marguerite : donner du temps

Ninon : exemple de "méthode"  individuelle

 

PascaleB
 Je sentais ça couver depuis mon expérience malheureuse avec les albums de Ribambelle et même peut-être avant: le sentiment insidieux qu'on était en train de tuer la poule aux oeufs d'or, d'assassiner Mozart, bref de perpétrer avec les meilleures intentions du monde le pire des crimes : tarir à la source le désir d'apprendre à lire.
Qui a eu cette idée folle un jour de disséquer l'album?
J'ai travaillé plusieurs années sur des défis lecture très ludiques et me suis passionnée pour ces activités qui, souvent sous forme de jeux de pistes ou de jeux de l'oie poussaient les enfants à découvrir des albums, à les manipuler, les échanger avec d'autres classes, inventer des questionnaires, des mots croisés, des puzzles et toutes sortes de jeux de lecture à partir des histoires. Nous nous rencontrions en fin d'année pour une journée très conviviale avec pique-nique dans le champ voisin d'une de nos écoles rurales et ça, oui, ça motivait furieusement les enfants pour la lecture.
Depuis sont apparues tout un tas de méthodes qui prétendent appuyer l'apprentissage de la lecture sur un travail systématique autour des albums et c'est parfois calamiteux. Le niveau de vocabulaire d'un conte intéressant ou d'un album jeunesse sympa est généralement assez
ambitieux.
Lire quotidiennement de telles histoires enrichit forcément l'expression orale mais de la à l'utiliser comme support d'étude, il y a un pas qu'à mon avis on
n'aurait jamais du franchir. Ce qui était source de plaisir devient pour un grand nombre d'enfants un pensum aussi rébarbatif que le Bled et on obtient exactement l'effet inverse de celui qu'on souhaitait obtenir: Des gosses qui vont bouffer passivement de la vidéo ou de la télé.
Donc, depuis l'an dernier, dans la classe, l'album est protégéil ne peut faire l'objet d'un travail scolaire qu'avec l'accord des enfants, on en raconte un par jour pour le plaisir, chacun est libre de "s'en manger" un dès qu'il a une petite fringale, de le raconter ensuite à ses copains, de commenter, de critiquer mais fini les phrases à remettre dans l'ordre, les mots du texte à identifier dans des listes, les questions si on ne les invente pas soi-même.
Et je me demande si je ne vais pas appliquer la sauvegarde aux textes libres que, sous prétexte "d'observation de la langue" j'avais commencé à cuisiner à la même sauce.
Alors, j'attends vos avis, surtout ceux qui vont me contredire et donc me sortir de ce subjectif jugement.....mais avec arguments solides, hein!

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Juliette

j'ai décidé en début d'année qu'ils sauraient reconnaître un verbe conjugué, (pourquoi???? sûrement aussi par réaction à la petite histoire de Bernard  Collot sur ses élèves en sixième qui découvrent le terme de conjugaison....)

Bref, je me suis servie de leur représentation de l'école et des devoirs : ils avaient un ou deux verbes à apprendre et à écrire pour tous les lundis, les familles étaient rassurées, eux aussi, et moi donc... ça rentrait bien péniblement, et j'étais inquiète, on est en mars, tout ça pour rien... quelle galère ces devoirs à la maison!
Je me suis lassée de ces maudits verbes, à réciter bêtement, et après  l'imparfait,  je leur ai filé des fiches phrases à conjuguer avec des verbes à remplir, en classe... le truc super bateau encore... mais ils ont adoré le changement, et l'imparfait a eu l'heur de les toucher... ils m'ont redemandé des fiches...

alors là j'ai sorti la fameuse séance, apprise à l'IUFM, de tri de textes, avec 20 textes sur la Lune, ils ont trié, je leur ai dit que l'intention du scripteur du texte pouvait servir de classement, on a cherché les intentions des auteurs des groupes qu'ils avaient faits, on a retrouvé les histoires les poèmes les documentaires les consignes,  même les pubs cachées dans une 4 ème de couverture, et là, on a cherché le temps des verbes,

et le miracle est arrivé : ils ont joué à me faire deviner de quel type de texte il s'agissait rien qu'en me citant un verbe conjugé... ils en ont tous trouvé un, tellement grande était l'envie de me piéger... et de vérifier si ce critère fonctionnait si bien que ça...

et ça marchait, ils trouvaient des imparfaits dans les récits, des présents de l'impératif dans les consignes... ils ont bien aimé cette tension où mon honneur était en jeu : allaient-ils prendre la maîtresse à son propre discours? et à la fin, Coralie a demandé : "mais alors, nos textes libres, où on raconte ce qu'on a fait, c'est de quel type puisque c'est pas de la fiction, et pourtant on raconte des histoires?"

j'ai failli la remercier pour la transition, et on en est resté sur cette question, et je suis bien ravie! séance suivante dès qu'on a le temps : on prend le cahier d'écrivain, et on cherche les types d'écrits dans leurs textes... yaouh.... ou alors on va la jouer discrètement :  à chaque fois qu'ils écrivent un nouveau texte, vérifier l'adéquation entre le type de texte et le temps des verbes... p'têtre même qu'ils vont comprendre l'intérêt d'étuider le passé simple pour écrire la suite des récits sur le thème de la frontière, puisqu'ils ont accepté de le faire pour se faire publier en recueil... je ne perds pas espouar!
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 Marguerite : Donner du temps
Envie de partager avec vous ce moment tant attendu et qui arrive en fin d'année.
J'ai cette année un CP CE1
Je leur ai proposé à plusieurs reprises la création d'albums mais sans succès , une amorce vers janvier avec des histoires simples écrites mais l'illustration ne venait pas et les projets restaient dans les pochettes; J'ai laissé traîner dans la bibliothèque bien en vue après les avoir présentés aux enfants des albums réalisés il y a quelques années par des CP.
Lors d'une rencontre du chantier écrire, j'ai admiré  les albums apportés par Marie et je me suis dit qu'il fallait que je relance et laisse du temps

et puis un jour j'ai suggéré à Tristan qui avait une petite histoire ( Tu ne veux pas faire un album) "Oui mais pas tout seul" alors on a demandé qui voulait l'aidé et il a choisit Katel et tous deux sans relâche ont dessiné fait les fonds et cherché des modèles pour leur loup. Et l'album est né, avec de super détails dans l'illustration preuve que toutes les lectures d'images et d'illustrations faites pendant l'année avaient germé dans leur tête.
J'ai numérisé et c'était parti, très fiers ils l'ont montré aux autres aussitôt un puis deux puis trois puis;.. enfants se sont lancés dans la réalisation d'albums il y en a 5 finis et deux voir trois en chantier dommage c'est la fin de l'année, heureusement je les garde l'an prochain. Et puis ont vu le jour deux fiches de fabrication pour le journal et une BD est en court.
Donner du temps c'est le maître mot, peut-être que je ne lâchais pas assez et que je n'aurais pas accepté qu'ils y passent le temps qu'ils ont pris et qu'il faut si on veut un vrai travail ou seulement fallait attendre qu'ils soient prêts.(Il a déjà fallu du temps<pour les pacifier et faire entrer dans la classe une atmosphère de boulot calme)
 Je suis seule en PF dans cette école et comme chaque année ( un peu moins à chaque fois) je ne me permet pas assez je ne leur permet pas assez malgré mes fortes convictions ( la salle des maîtres joue sur mon inconscient malgré moi et mes certitudes heureusement que les rencontres et lectures mail ou bulletins me rappellent ce que je veux vraiment.

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Ninon

j'ai dans ma classe un enfant qui présente un peu les mêmes difficultés que B. décrit par Philippe. Il est dans sa 4ème année de  Cycle II. Je savais qu'il était en difficulté, à l'écrit. Mais comme il
écrivait peu... difficile à mesurer. Lorsqu'il faisait des fiches ortho, il savait recopier les mots déjà donnés, et pouvait faire illusion.
Au second trimestre, il a commencé à produire des textes. Net progrès ! D'abord, une phrase pour accompagner son dessin, puis une question  à poser à la classe... J'ai pu alors mesurer l'étendue de ce qu'il avait à apprendre. Même en lisant à voix haute, bien souvent je necomprenais pas ce qu'il avait écrit. 
Alors depuis, il écrit puis me relit, ou me dicte, et nous reprenons ses phrases tout en scandant les mots, en tapant dans les mains, en marchant... Il ne différencie pas syllabes/mots/phrases. Donc je lui demande de tracer un trait au crayon à papier pour chaque mot, nous les "marchons", on vérifie que ça correspond, et il écrit ceux qu'il connaît (en fait c'est ce que je faisais en GS dans les premières expériences d'écri-lire). Parfois, je lui récris également ses  phrases en "mangeant" les espaces, il doit à nouveau scinder les  mots. Et nous travaillons particulièrement la mémorisation de mots
 simples.
 Pour les dessins, ah ! les dessins ! grande inquiétude des parents :  mais que font-ils donc en classe pour avoir le temps de faire autant  de dessins ? Les occasions de faire un dessin sont multiples, même dans une journée de "travail" bien remplie. Pendant la réunion, en écoutant les présentations, en attendant la récré après avoir fini son activité... et même comme activité principale... pour certains.
 Bon, dernièrement, côté dessins, ils s'étaient calmés. Mais j'ai amené un vieil électrophone, des reproductions des Rotoreliefs de Duchamp, et c'est reparti pour un tour (c'est le cas de le dire). En tout cas, c'est magnifique, et comme les enfants ne sont pas persuadés de pouvoir utiliser l'électrophone, ils font ça très silencieusement. C'est déjà pas mal !!!