Monographie d'un événement

Des travaux de ce type ont été faits à de multiples reprises. Ce qui est, peut-être, nouveau c'est le fait d'avoir en tête de tirer quelques fils permettant de démêler un tant soit peu l'écheveau de la complexité pour essayer de comprendre ce qui est à l'oeuvre et qui fonctionne (ou pas), plutôt que de faire vitrine. Quelles conditions peuvent faire qu'un événement devienne et/ou provoque quelque chose ? Qu'est-ce qu'il provoque ? Qu'est-ce qui se joue derrière l'apparence des choses que sont les actions et productions réalisées par les enfants ? Quelle place pour l'enseignant ? Quel statut pour l'élève ? etc...... (Christian Drevet)

 

Chez Christian Drevet : Le journal (texte ) 1er épisode

Première précisions concernant ce texte :

- 1 quant au 3ème type, je fais peu de choses au forceps

- 2 Je n'ai pas "sommé", j'ai "proposé"

 

1 -

Les remarques de Philippe à popos du mini-guide "recherches doc" sont tout à fait justifiées : c'est effectivement poser un cadre assez antinaturel (au sens où spontanément on ne ferait pas comme ça). Le but était, comme tu l'as compris, d'éviter la recopie et aussi d'éviter que les enfants se noient dans des documents trop complexes. De ce point de vue là, j'ai un handicap par rapport à Longechenal : pour la complexité, je pouvais leur proposer, si besoin, des documents plus simples : je connaissais bien la doc dont nous disposions. Au Grand-Lemps, tous les documents sont quasi en vrac dans la bibliothèque, alors, c'est un peu difficile de s'y retrouver : la doc que les enfants trouvent est un peu aléatoire ! Ceci dit, à terme, tu as raison, il faudra faire évoluer le cadre ou les aides pour se rapprocher d'une démarche plus courante ou l'abandonner : il faut que je regarde ça de près !

 

Ta comptabilisation fait penser - elle provoque en tous cas le même effet - au "planning de lancement" dont parle Paul le Bohec : ça joue sur l'émulation dans la création, la surenchère jubilatoire....

 

Quant au 3ème type.... Pour l'instant, je fais un peu les choses au "forceps" : je chope toutes les occasions de les faire écrire.. En ce moment, on est bien parti dans des compte-rendus d'expériences. Quand une situation nouvelle se présente, je ne laisse pas tellement le choix, du style : "bon, maintenant, tu as fait l'expérience, tu vas en faire un compte-rendu qu'on conservera dans ce classeur dans lequel on mettra tous les compte-rendus d'expérience." Je demande de faire comme si c'était le prolongement normal du travail.... Je pense que d'abord, il faut leur montrer qu'ils peuvent faire, que ce n'est pas insurmontable, qu'ils y seront aidés, etc..., mais pour ça, il faut bien qu'ils fassent ! 

 

2 -

Philippe R : oui, comme si c'était logique (du moins normal dans le fonctionnement de la classe) et non pas comme si cela était voulu par toi. Et il ne faut pas, à mon avis, que l'enfant pense que c'est pour nous, parce qu'on le lui as demandé..

 

c'est moi qui le lui ait demandé , proposé plutôt... mais il le fait pour en laisser une trace dans le classeur de sciences, pour le mettre dans le journal...... Dans la suite, à ceux qui seront lancés dans l'écriture, je ne proposerai plus. Aux autres, je proposerai encore pour les lancer, des textes sur les expériences ou d'autres choses. A terme, l'environnement doit pouvoir agir de plus en plus sans qu'on intervienne, ou permettre qu'on intervienne de moins en moins. Ces trucs (outils) : le journal, le classeur-mémoire, ce sont des sortes de médiateurs entre l'enfant et son appropriation des langages. Ce sont des outils qui donnent du sens à l'écrit : j'écris pour laisser une trace de ce que j'ai fait (trace dans l'histoire du groupe) ou pour le communiquer à d'autres. En laissant une trace, en communiquant (si je peux le faire, c'est à dire si j'en suis à un stade de maîtrise du langage écrit qui me permet de le faire), d'une certaine manière, je prouve que j'existe (et si je n'en suis pas tout à fait à ce stade de maîtrise, p'têt que le maître peut m'aider, juste pour me montrer que le pas à faire vers ce plus de maîtrise n'est pas si grand que ça et du coup, la prochaine fois, p'têt que je vais me lancer tout seul, p'têt même que je me lancerai tout seul une autre fois pour faire autre chose...)

Je n'ai pas "sommé" de faire, j'ai proposé.. Quand je propose, je ne suis pas sûr que ce sera suivi d'effet, ce qui permet que ça marche, c'est que l'écrit n'est pas proposé comme un exercice scolaire, il est proposé dans une situation vraie : une situation pour laquelle il est fait ( ce qui aide aussi à marcher, c'est la confiance en soi, aux autres, savoir qu'on pourra être aidé... c'est aussi que je vais proposer à celui que je pense capable de faire, ou presque de faire, pour certains c'est trop difficile, donc ce n'est pas la peine de leur proposer )... 

Chez Christian Drevet : Le port (texte), 1er épisode

 

1 - Intro

 

1 - Voilà de quelle manière je verrai la suite du travail :

 

- d'abord savoir ce qui manquerait dans le récit : en lisant on peut avoir des interrogations. A partir de ces questions, le récit peut être complété

 - ensuite le récit tout seul ne nous dit pas grand chose sur ce qui a pu se passer au cours de ce processus sur les apprentissages que les enfants ont pu réaliser, sur l''évolution du groupe et des individus qui le composent... Il faut donc faire un travail d'interprétation : ce qui m'a intéressé dans le travail de Nicolas Go c'est la mise à jour qu'il fait de ce qu'on pourrait appeler les "enjeux didactiques" à partir de la situation de classe qu'il décrit (l'entretien du matin). Dans notre vision des choses, c'est peut-être là que serait la place du "chercheur" (je le mets entre guillements parce que je ne suis pas sûr que, du point de vue de l'institution, le mot convienne tout à fait dans ce contexte).

 

Autre interrogation : dans un tel récit, la matière est-elle suffisante pour risquer une interprétation ? Il serait peut-être bien de compléter le récit par un questionnement auprès des enfants pour avoir leur ressenti sur le déroulement des opérations : pourqoi ils ont décidé de participer, ce qui leur a plu, les a intéressé, ce qu'ils pensnt avoir appris, .... J'essaie d'en interviewer quelques uns après les vacances..

 

 De manière générale ce type de mise à jour - de ce qui se joue dans l'activité ou les activités de nos classes me semble important dans le contexte de la réforme Fillon. Dire "assurer à tous les compétences de base" peut prêter à confusion : on peut entendre "ne faire plus que du français et des maths (et dit comme ça, ça veut dire "ne faire plus que des exercices de français et le math"), en somme faire une sorte de bachotage... Or, il me semble que ce que nous pouvons montrer c'est que les "compétences de base" en matière de langages ne peuvent en aucun cas se développer en dehors de leur contexte d'utilisation et qu'on est là dans du culturel, qu'on ne peut pas réduire le langage écrit à un contenu d'enseignement, pas plus que les maths ou tout autre moyen de communication et d'expression. Si les contenus d'enseignement fournisse une sorte de référentiel qui aide les enfants et leurs enseignants à "savoir où ils en sont", en aucun cas on ne peut réduire leur apprentissage à ce référentiel. Je trouve que c'est urgent de mettre ça à jour avant qu'on soit réduit à des listes d'item à faire bachoter : du point de vue du développement des langages des enfants c'est illusoire... mais peut-être que ce n'est pas là le but de la réforme ( ?)