La libre circulation

Est-ce que l'on peut penser qu'une classe, un établissement scolaire, où la circulation individuelle des enfants et des adolescents, les déplacements collectifs dans les couloirs et les espaces communs, la présence dans les salles ou les cours, ne peuvent s'effectuer que sous la surveillance constante d'adultes, puisse constituer un lieu de vie où se construisent autonomie, citoyenneté, apprentissage... et plaisir d'apprendre ?

Est-ce que l'on peut penser qu'un système éducatif qui condamne des enfants et des adolescents à demander l'autorisation d'aller aux toilettes, parfois avec le risque d'être sanctionnés, respecte la dignité de la personne ?

Est-ce que l'on peut penser que soumettre la satisfaction d'un simple besoin élémentaire au pouvoir et à l'appréciation arbitraire de ce que l'on est bien obligé d'appeler une autorité hiérarchique, permet de devenir un citoyen libre et responsable.

 Si nous sommes nombreux à ne pas le penser, il n'en reste pas moins :

• Que la libre circulation dans une classe et un établissement scolaire suppose une autre approche de l'acte éducatif, d'autres pratiques pédagogiques, individuelles et collectives, une autre conception des droits et des obligations des membres de la collectivité.
• Qu'elle se heurte à un nombre important de problèmes d'ordre matériel (organisation de l'espace, des locaux) et réglementaires (textes concernant la responsabilité, la sécurité, réglements intérieurs etc....) ou simplement de représentations et de croyances (sécurité...)

Pour pouvoir agir, il semble nécessaire que l'on puisse mutualiser les expériences concrètes des uns et des autres, aussi bien les pratiques que les problèmes rencontrés, les approches différentes de l'acte éducatif, les textes qui posent problème comme ceux sur lesquels nous pouvons nous appuyer. C'est à quoi ce site veut s'atteler.

Bernard Collot et Jean Le Gal

L’ICEM (Institut Coopératif de l'Ecole Moderne) vous propose de signer et faire signer massivement le manifeste ci-dessous pour une circulation libre et responsable des enfants dans l’école.

Lorsque l’ICEM aura recueilli 250 signatures, le manifeste sera transmis aux autres mouvements pédagogiques, aux syndicats enseignants et rendu public auprès de la presse ; puis il sera remis au Ministère.

Par ailleurs une question écrite et un argumentaire seront adressés à des parlementaires pour interpeller le Ministère sur cette question (si vous connaissez un parlementaire susceptible de poser cette question, merci de nous le signaler).

L’école publique inscrit dans ses objectifs prioritaires le respect de l’enfant, de sa dignité, de ses besoins, de ses rythmes.

Elle a pour rôle de le préparer à exercer sa liberté et son autonomie et de le former à être un citoyen actif et responsable.

Dans le cadre des pratiques pédagogiques diversifiées préconisées par les Instructions Officielles et les directives pour la mise en œuvre de la citoyenneté à l’école, il est nécessaire que les enfants s’approprient les espaces de l’école (classes, ateliers, BCD, couloirs, toilettes) et les temps scolaires. Apprendre à gérer ses déplacements et son temps contribue à favoriser les apprentissages.

Pour cela la LIBRE CIRCULATION des enfants dans l’école doit être possible. Elle reste sous la responsabilité des enseignants mais il est nécessaire qu’elle soit organisée avec les enfants (conseils coopératifs de classe, d’école, élaboration de règles de vie, Règlement Intérieur…)

Mais celle-ci se heurte actuellement à la législation en place qui exige la présence permanente de l’enseignant avec TOUS ses élèves.

C’est pourquoi, je soussigné,………………………………………………….., affirme appliquer le principe de la Libre Circulation des élèves dans mon école, et être ainsi en total accord avec les Instructions Officielles en permettant une véritable éducation concertée à une citoyenneté active et responsable.

Je déclare assumer la contradiction qui existe entre la législation relative à la responsabilité des enseignants actuellement en vigueur.

Je demande au Ministère de l’Education Nationale une étude approfondie de la situation actuelle afin que les cadres de référence juridique, pédagogique et éducatif soient enfin clairement définis.

Question de Patrick Stubbe

Quand on parle de libre circulation, est-ce qu'on parle du droit à l'auto-organisation, basé sur le discipline du travail qu'on a décidé de faire ou parlons des pratiques "totalement libre" (style Summerhill, dirai-je pour en donner une image -mais qui est imparfaite-) où les enfants décident quoi faire par ce que leurs impulsionss leur disent qu'il est temps de changer d'activité?

Réponses et précisions apportées par Jean Legal

L'expression "libre circulation" peit en effet être interprétée comme une liberté sans contrainte et sans contrôle. C'est, il me semble, l'interprétation qui a servie de point d'appui à la réponse qu'a faire Ségolène ROYAL, Ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire, dans sa réponse à Jean-Marc AYRAULT, en mars 2000. (voir les échanges avec Mme Ségolène Royal sur ce sujet)

C'est avec le plus grand intérêt que ces travaux ont été étudiés, mais tout en comprenant les préoccupations exprimées par M. LE GAL, je ne peux que confirmer les réponses qui lui ont déjà été apportées : une totale liberté de circulation des enfants dans les locaux des écoles maternelles et primaires est à l'évidence incompatible avec les responsabilités qui incombent aux personnels du ministère de l'Education nationale, en matière de surveillance et de sécurité des élèves.

Dès lors, il n'est pas envisagé de modifier le règlement intérieur des écoles en ce sens. "

Je suis évidemment d'accord avec le fait qu' : " une totale liberté de circulation des enfants dans les locaux des écoles maternelles et primaires est à l'évidence incompatible avec les responsabilités qui incombent aux personnels du ministère de l'Education nationale, en matière de surveillance et de sécurité des élèves."

Aucun des écrits contenus dans nos dossiers ne peut laisser entendre que nous réclamions une totale liberté de circulation, sans aucun contrôle. Les règlements que nous avons proposés respectent les principes du droit. L'exercice d'une liberté se fait dans le respect des limites et obligations posées par le règlement, et en fonction des capacités de discernement des enfants et de leur niveau d'autonomie.

Sans doute fallait-il le préciser.

Freinet, lui-même n'a jamais préconisé une liberté sans obligations et limites.

Dans son Invariant 22, il affirme que " L'ordre et la discipline sont nécessaires en classe…On croit trop souvent que les techniques Freinet s'accommodent volontiers d'un manque anarchique d'organisation, et quel'expression libre est synonyme de licence et de laisser-aller. La réalité est exactement contraire : une classe complexe, qui doit pratiquer simultanément des techniques diverses, et où on essaye d'éviter la brutale autorité, a besoin de beaucoup plus d'ordre et de discipline qu'une classe traditionnelle, où manuels et leçons sont l'essentiel outillage...Nous avons besoin d'un ordre profond inséré dans le comportement et le travail des élèves ; d'une véritable technique de vie motivée, et voulue par les usagers eux-mêmes"

Mais, dans la pratique, il n'est jamais facile de savoir quelles limites poser et comment réagir en cas de transgression.

C'est quotidiennement que se pose le problème de la libre circulation.

Des faits parfois simples et leurs conséquences, souvent moins simples. Cette réalité est rarement exprimée, rarement connue. Qu'elle aille dans un sens ou dans un autre, ce n'est qu'à partir d'elle qu'une réflexion pourra s'élaborer, qu'un débat pourra avoir lieu, que des actions pourront d'élaborer.  

Il existe un certain nombre d'obstacles qui entravent les avancées aussi bien sur le respect de la dignité des personnes que sur la possibilité d'aider les enfants à conquérir leur autonomie et de la vivre. Qu'est-ce qui empêche ou favorise la libre circulation des enfants dans le système éducatif ? Cette identification est indispensable si l'on veut pouvoir faire des propositions.

La libre circulation comme élément fondamental des pédagogies modernes. Non seulement elle concerne les droits élémentaires des enfants mais elle induit d'autres approches de l'acte éducatif lui-même.

Il existe un ensemble de textes, parfois contradictoires, mais qui régissent la situation actuelle. Il est bon de les connaître.

Joël Blanchard

Quant au cadre légal , il est plus flou qu'on ne pense encore là. AUCUN TEXTE N'INTERDIT LA LIBRE CIRCULATION. Les seuls textes existants disent que l'enseignant doit savoir où et avec qui sont ses élèves à tout moment (ce qui entre nous est la moindre des choses), il est responsable de l'action pédagogique conduite quand ils sont sous sa responsabilité. Rien ne dit qu'ils doivent être avec lui et dans son champ visuel. Pour avoir participé à de nombreuses formations au plan national autour des BCD, je dois dire que le problème de la libre circulation (posé entre autre par l'accès en BCD) est une question récurrente. Et beaucoup d'enseignants se réfugient derrière ce fantasme de sécurité et de champ visuel pour freiner leurs pratiques pédagogiques. La libre circulation est même préconisée dans les textes sur les BCD.